En juin 2023, le Qatar alerte la Côte d’Ivoire relativement à plusieurs ressortissants syriens qui tentent d’entrer dans leur pays avec des passeports ivoiriens. Interrogés par les services de police qatari, ces individus ont reconnu leur participation à un trafic illicite de documents administratifs ivoiriens. Le pays du Golf exige que toute la lumière soit faite sur cette histoire rapidement. Merci le Qatar !
Selon Jeune Afrique dans son édition du 5 octobre 2023, ce trafic concerne 120.000 passeports. A titre d’exemple, il faut noter que 120.000 personnes, c’est approximativement la population de Ferkessédougou selon le dernier recensement de la population ivoirienne.
Mais avant ce fait, le quotidien L’Inter n° 5082 du jeudi 21 mai 2015 nous apprenait l’arrestation au corridor de Gagnoa de dame CISSE Maïmouna, avec en sa possession un grand nombre de cartes nationales d’identité (500 000). Encore à titre illustratif, 500.000 fausses pièces d’identité, c’est plus que toute la population de Korhogo qui est pourtant la troisième ville la plus peuplée de notre pays après Abidjan et Bouaké.
La fraude sur la Carte Nationale d’Identité ivoirienne est confirmée par le journal gouvernemental Fraternité Matin dans sa parution du vendredi 22 mai 2015 qui annonce le chiffre de cent quatre-vingt-seize (196) pièces frauduleuses saisies.
Le journal L’Éléphant Déchaîné, consacre 9 de ses 12 pages dans sa parution n°323 du vendredi 29 mai 2015 à la fraude sur les CNI. Ce journal qui présente des fac-similés de faux documents et pièces administratives, met à nu l’existence d’un vaste réseau de production frauduleuse à grande échelle de cartes nationales d’identité. « Ils en délivraient 1000 par jour à Abidjan, au moment de notre enquête. Sur la base de vrais faux extraits de naissance et/ou certificats de nationalité. Les demandeurs, exclusivement des non Ivoiriens, payaient la somme de 20.000FCFA et, au bout de 48 heures, devenaient « Ivoiriens » avec leur vraie fausse CNI, en poche. », explique Tiémoko Assalé Antoine.
Le site en ligne L’Infodrome nous apprend par un article le 7 septembre 2023 que 17 000 imprimés sécurisés de certificats de nationalité et de casiers ont été soustraits des services judiciaires ivoiriens. Le ministre Sansan Kabilé de la justice confirme l’information par un communiqué : « Il est porté à votre connaissance que des imprimés sécurisés de certificats de nationalité et de casiers judiciaire ont été frauduleusement soustraits de nos services et servent à l’établissement de faux actes ». Oui vous avez bien lu. Ces documents ont été volé dans les services du ministère de la justice. Ne riez pas…
Dans un article intitulé : « fraude sur la nationalité ivoirienne : des employés d’un cacique du pouvoir arrêtés », ce même site nous apprend que « les enquêteurs porteraient désormais leur attention sur le personnel de la Société nationale d’édition de documents administratifs et d’identification (Snedai). Cette société est proche d’Adama Bictogo, président de l’Assemblée nationale et membre influent du parti au pouvoir. Dans le cadre de l’investigation, des salariés de cette entreprise liée au pouvoir en place auraient été appréhendés, et certains d’entre eux feraient l’objet d’une surveillance téléphonique minutieuse. »
Au vu de toutes ces informations, nous sommes désormais d’accord – Parti au pouvoir comme opposition- qu’il existe un vaste réseau de don de pièces d’identité ivoiriennes à des ressortissants étrangers dans notre pays. Les chiffres avancés font peur car ils vont au-delà des villes les plus peuplées de notre pays.
Selon les chiffres communiqués par la ministre Kaba Nialé, le 13 juillet 2023 sur le site internet du gouvernement, il y a 22% d’étrangers en Côte d’Ivoire. Pour mieux illustrer mes propos, un pays comme la France où le débat sur l’immigration fait rage compte 7,8 % d’étrangers.
Un jour, il faudra nous expliquer pourquoi le débat sur l’immigration est tabou dans notre pays et qu’à chaque fois qu’on veut l’évoquer, certains y sont réfractaires comme s’ils s’en servaient comme réservoir électoral. Qui a intérêt à ce que l’état civil de notre pays ne soit pas sécurisé ?
Récemment, avant les élections municipales, le PPA-CI a dénoncé la présence de personnes étrangères sur la liste électorale de notre pays. La commission électorale a préféré faire la sourde oreille comme le gouvernement d’ailleurs. Mais en fait, si des personnes étrangères peuvent se faire établir des CNI et des passeports ivoiriens en 48 heures, qu’est-ce qui les empêche de s’inscrire sur la liste électorale ? Qui dit que les destinataires des 17.000 certificats de nationalité volés au ministère de la justice ne sont pas sur la liste électorale ?
Quand la presse nous révèle que des employés d’un cacique du pouvoir sont mêlés à ces affaires de fraudes sur les documents administratifs, ne sommes-nous pas fondés à croire que le crime profite à ceux qui refusent qu’on audite la liste électorale ?
Ces questions restent posées…
*Fabrice Lago est le Secrétaire national technique en charge du Marketing Politique au sein du Parti des Peuples Africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI)